Ce numéro d’Ocula est consacré à la mode, c’est-à-dire à cet univers qui comprend des ensembles d’expressions, de représentations, de manières d’être et de comportements dans des espaces et des temps définis. De Mauro la définit comme « la tendance générale ou l’attitude prédominante, qui caractérise un moment historique spécifique et influence la manière de vivre et de se comporter », « le goût prédominant qui influence dans une période donnée la manière de s’habiller, de styliser », « l’industrie, le commerce de l’habillement en référence spécifique aux aspects innovants et créateurs » et encore « dans une distribution de variable définie sur un ensemble non continu de valeurs, celle qui apparaît plus fréquemment  »

. La mode ne se réduit pas à une définition unique, elle ne se réfère pas non plus à un seul spectre de valeurs, mais elle nous permet de réfléchir largement sur différents systèmes de vie. Aborder la mode, c’est vouloir discuter d’un ensemble de sujets, impliquant différentes disciplines. Pour ces raisons, ce numéro d’Ocula s’enrichit d’interventions écrites par des chercheurs qui s’interrogent de diverses manières sur des questions liées à la mode et qui offrent différents points de vue. Aux côtés de la sémiotique, les deux approches classiques des études de mode : la sociologie et l’histoire.

Comme nous le rappelle l’une des définitions ci-dessus, la mode est placée dans une période précise, de sorte qu’elle peut être considérée pour son lien étroit avec l’histoire, se présentant comme une clé pour l’analyse de la dimension diachronique d’un certain type de phénomènes. L’histoire devient donc essentielle pour comprendre les événements de la mode, car ils sont toujours liés à leur époque, à leur déroulement, à leur évolution et à leur changement.

Au-delà des aspects historiques, la mode remet en question les espaces, les distances et les lieux dans lesquels elle prend forme ; elle montre les influences qui en découlent et révèle sa force à y laisser des traces et des signes, pour ensuite influencer la formation de nouveaux styles culturels. Il participe à la formation de ces goûts mondialisés dont on entend tant parler, qui non seulement dessinent le présent, mais qui ont des racines, encore une fois, dans le passé. La distance dans l’espace, en fait, est toujours aussi la distance dans le temps, même avec une dislocation qui n’est pas simplement chronologique. L’histoire est aussi la partie de la trajectoire des événements sur laquelle nous pouvons jeter un coup d’œil, bien qu’imprécis et partiel, afin d’émettre des hypothèses sur la trajectoire future. A cet égard, l’essai de Giuseppina Muzzarelli constitue une contribution importante, car il revendique à juste titre l’utilité de la perspective historique en ce qui concerne les phénomènes de mode. Elisa Tosi Brandi adopte également une perspective similaire et propose une recherche historique sur un auteur de textes visuels.

L’approche de Giovanna Franci à la mode est peut-être plus conforme à l’esprit des études de mode : l’auteur mêle sémiotique, sociologie de la littérature, genre et études culturelles. Et Ugo Volli, dans l’entretien approfondi qu’il nous a accordé, traite de la relation entre la sémiotique et la sociologie, ainsi que du thème des études de mode, avec une position très valable selon nous. S’il est vrai que la sociologie est la discipline qui a ouvert les études de la théorie de la mode, aujourd’hui les contaminations avec la sémiotique sont assez répandues, à tel point que le terme sociosémiotique est presque surexploité. Le regard sémiotique sur la mode prévaut dans les articles de Gianfranco Marrone, Pier Pietro Brunelli, Giovanna Cosenza, Francesco Galofaro, Luca Marchetti, Gabriele Monti, Giampaolo Proni et Elena Codeluppi. Les essais de Nello Barile, Nicoletta Giusti, Lella Mascio, Simona Ironico donnent plutôt le poids approprié à l’approche sociologique de cette question.

Maria Catricalà et Ilaria Pironti abordent les thèmes de la marque, typiques du marketing, par des études linguistiques, avec des résultats d’intérêt et de fraîcheur considérables pour le panorama des études de mode. Au-delà des affinités disciplinaires des différentes contributions que nous avons tenté d’indiquer jusqu’à présent, les essais sont divisés en sections thématiques suivantes : regards sur la mode – La mode dans le cadre – regards vers l’Est – Stratégies et consommation de la mode – Recherche sur le terrain – Identité et passions.

Comme nous l’avons dit au début de cet éditorial, la mode concerne différents domaines et implique différentes approches ; elle englobe une multitude d’aspects de la vie sociale et devient parfois la clé d’accès pour étudier les comportements et les constructions identitaires. C’est pourquoi il a semblé plus correct de fusionner les différents essais en fonction de la pertinence de la mode traitée, parfois évidemment pertinente, d’autres apparemment plus distants, car la mode peut imprégner même ce qui, en première instance, ne semble pas lui appartenir du tout….

Une dernière note concerne les chercheurs des études de mode italienne qui, ces dernières années, apprennent à se connaître pour partager leurs expériences d’enseignement et d’étude. Nous leur dédions ce numéro. En novembre 2007, nous publions l’essai de Simona Segre Reinach, qui n’avait pas paru en août à cause d’un malentendu. Il s’agit d’une contribution intéressante et provocante sur les notions de copie, d’imitation et de contrefaçon dans la mode, en particulier dans les relations italo-chinoises.